13 avril 2015

De la plume de Bernard AVRON...


Notre ami Bernard AVRON nous offre, par l'intermédiaire d'Agnès, ce petit texte, récit d'une belle histoire au dénouement heureux...

"UNE HISTOIRE VRAIE…
Le soleil est au couchant mi gris mi rouge.
Profitant des derniers jours de l’été indien je marche gaillardement dans le sable fin qui fait ici la grève.
Je hâte mes pas en direction du cap Blanc-Nez car je sais proche l’heure de la marée montante.
Dans notre famille de marins mon père adorait raconter l’histoire des touristes anglais téméraires (trop), coincés sur un éboulis de la falaise pendant quelques heures, priant pour que le vénérable océan accepte de se retirer. « L’occasion unique de converser avec les ammonites, les nuages et les oiseaux » comme il disait. 
Mais c’était hier, aujourd’hui, avec les portables, les appels au secours à la moindre gêne on assisterait au ballet maritime et aérien des sauveteurs et les touristes anglais auraient leurs têtes en photo dans le journal local.
Donc je marche toujours gaillardement.
Et voilà que, au plus loin de mon horizon, au lointain, comme on dirait au théâtre, un petit magma mouvant attire mon attention.
Trop petit pour être humain, mais trop mobile pour être anodin. Bizarre.
Quelque chose bouge là-bas et je ne sais pas quoi. 
Un chien… non.
Je m’approche prudemment.
A quelques mètres la situation se clarifie.
Sur un de ces longs filets que les hommes posent sur le sable (je dirais une dizaine de mètres environ) un goéland, les pattes prises dans ce filet devenu piège pour lui, se débat. A chaque soubresaut il ne fait que s’emberlificoter davantage entraînant le filet qui saute avec lui.
Et la mer monte toujours…
Surmontant ma peur (le bec et les griffes de cet animal sont très aigus) je m’avance vers lui.
Je tente de lui parler doucement mais le goéland est terrifié et moi pas loin de l’être aussi pour tout vous dire.
J’arrive entre deux tremblements de filets, de mes bras et de la bête, à défaire trois ou quatre tours morts du filet sur ses pattes.
Et là je crois que l’oiseau est sauvé.
Lui le croit aussi et tente de s’envoler. Mais c’est le filet qui s’envole, puis le ramène sur terre.
L’oiseau est toujours prisonnier en fait.
Force m’est de constater que la patte du goéland est encore prisonnière du filet.
A cet instant précis, je m’aperçois enfin que l’oiseau est bagué et que le fil fin d’une maille du filet s’est glissé dans la bague en forçant le passage de sa fermeture.
Je précise pour ceux qui ne sont pas habitués à l’observation des oiseaux que « la bague est un objet inventé par les hommes pour préserver l’animal, le contrôler dans tous ses déplacements et ainsi mieux le comprendre, mieux le respecter et mieux favoriser sa survie ».
Le goéland et moi-même avons alors compris que nos destins étaient liés et que j’étais prêt à user le filet avec mes dents, car la mer inexorablement montante s’approchait.
J’ai bloqué sa patte avec mes mains, il a mis sa tête dans le creux de mon bras et en force petit à petit j’ai fait glisser le fil.
Le goéland est resté un moment immobile, en silence. Puis il a frissonné comme s’il se réveillait d’un mauvais rêve, et comme au ralenti il a fait son check up : patte droite : ok, gauche : ok, aile droite : ok, aile gauche : ok, cou, bec, yeux : ok. Et presqu’au ralenti il s’est envolé.
Ensuite il a fait deux grands tours autour de moi.
Je n’ai pas comme les Fous du Cap la connaissance du langage des goélands, mais j’ai imaginé que c’était sa façon de dire « merci ». 
A tout hasard j’ai dit « Il n’y a pas de quoi »." Bernard AVRON


Il y a maintenant quelque part un goéland qui te remercie, et Les Fous du Cap avec ;-)


5 commentaires:

  1. Photos et texte magnifiques, j'ai adoré lire cette histoire :)
    Merci à vous deux
    Bonne journée

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  2. prachtige foto,s maar ook een geweldige uitleg.

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  3. C'est vraiment très touchant.Un beau moment pour vous .Mérité.
    Merci pour ce beau texte.

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  4. J'aime ce "y'a pas de quoi".
    Trés joli texte.
    (G.Bigex)

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