24 février 2009

Préliminaires : les radeaux

Pendant quatre mois pleins, les mouettes ont été absentes des colonies de reproduction et de leurs parages. Aucune n'est même visible en mer, sauf exception, à l'occasion de certains coups de vent. Aucune en tout cas ne semble s'intéresser de près ou de loin aux falaises dans lesquelles elles ont vécu près de huit mois la saison précédente et où elles reviendront très probablement. Elles sont au large où elles vaquent à leur subsistance, à leur survie.
Les premiers signes que cet état de choses va changer se manifestent souvent dans les derniers jours de décembre. Rien de très évident encore : on commence par voir des mouettes circuler au large des zones de reproduction, hors de toute circonstance météorologique inhabituelle. Il arrive même qu'avec un peu de chance, on voie par hasard l'une ou l'autre venir faire un tour au vol non loin des falaises, plus rarement encore se poser sur la mer, en face.
Tout change en janvier, très souvent dès les premiers jours du mois. Avec un déroulement des évènements variable selon les années et surtout selon les conditions climatiques locales. Mais toujours selon le même schéma général. Des mouettes arrivant du large viennent se poser silencieusement sur l'eau, face aux falaises, peu après le lever du jour, disons à partir de 9h. Elles arrivent isolément ou par petits groupes et forment sur la mer des rassemblements que l'on nomme « radeaux ». Ces radeaux grossissent au cours de la journée avec l'arrivée de nouveaux oiseaux. Au début, ils se dissocient en fin de matinée ou au début de l'après-midi. Peu à peu, les mouettes repartent au large, comme elles sont venues, seules ou par petites bandes.
C'est à partir de ces rassemblements que les oiseaux partent vers les falaises. Mais il faut souvent attendre plusieurs jours après la constitution des premiers radeaux pour qu'elles se décident. On les voit de plus en plus souvent interagir bruyamment, former sur l'eau des couples éphémères... Puis un oiseau semble se décider s'envole en direction de la falaise, suivi ou non par d'autres. Se ravise, revient précipitamment vers la sécurité du radeau. En trente années d'observation de ces préliminaires, je n'ai pas réussi à identifier ce qui les décidait à se poser enfin. Mais lorsqu'un ou plusieurs individus se sont effectivement posés, c'est souvent le radeau entier qui les suit. Et c'est toujours un spectacle assez extraordinaire et émouvant que d'assister à ces premières ruées massives et incroyablement bruyantes vers la falaise.
Situation fragile au demeurant. Car un rien, une alarme de goéland, le passage d'un corvidé, l'envol mal interprété d'une des mouettes ou, a fortiori, le passage d'un prédateur, provoque un envol panique de toutes. Elles reviennent rapidement ou, plus souvent, reforment le radeau pour quelques minutes ou pour le reste de la journée. Tout ce que je sais, c'est que la présence d'un prédateur à proximité, ou son passage en début de matinée retarde considérablement les poses, voire les empêche pour la journée. Par ailleurs, certaines conditions climatiques (vents d'est ou du nord en particulier) réduisent considérablement la taille des radeaux, ou même provoquent l'absence totale des mouettes au voisinage des colonies.
Les jours passent, janvier se termine et février avance. Les radeaux s'étoffent, peuvent comporter des centaines d'individus. Ils sont de plus en plus réguliers et s'attardent jusqu'à la tombée de la nuit. Les poses sont également de plus en plus régulières et massives. Les oiseaux de moins en moins susceptibles, moins prompts à s'envoler et regagner la mer au moindre pet de goéland. Les sites de reproduction se peuplent, en commençant par les zones les plus productives. Les couples se retrouvent, se forment... La colonie reprend son rythme de croisière. Life goes on...
Jean Yves Monnat 24 février 2009
À suivre...

1 commentaire:

  1. Grand merci pour vos visites!
    Je m'évade souvent jusqu'au Blanc Nez par le biais de votre blog que j'adore.
    Muvrini est très sympa mais pas discret lorsqu'on surfe pendant les heures de boulot... Glurps!!!
    Je serai ce We à Hardelot et j'espère pouvoir m'offrir une petite virée aux Fulmars de la pointe de la Crèche ou du Blanc Nez...
    En espérant vous rencontrer un des ces WE....

    Steph

    RépondreSupprimer